QUAND L’IA COMMET DES ERREURS : 5 EPIC FAILS

Depuis quelques années, les intelligences artificielles conversationnelles ont envahi notre quotidien. Elles rédigent des mails, gèrent le support client, organisent nos journées, et même réinventent la façon dont on recherche sur Internet. Bref, elles sont partout. Pourtant, leur montée en puissance ne s’est pas faite sans heurts… ni erreurs.

Car si l’IA peut se montrer bluffante, elle peut aussi… complètement dérailler. Entre les réponses absurdes, les hallucinations involontaires et les erreurs juridiques qui coûtent cher, certaines entreprises se sont retrouvées au cœur d’histoires dignes d’une comédie. Et Internet, lui, ne s’est pas privé de s’en amuser.

Dans cet article, nous allons revenir en détail sur cinq incidents réels qui se sont produits entre 2022 et 2025. Des situations cocasses qui révèlent aussi une réalité sérieuse : l’IA n’est pas infaillible, et mal encadrée, elle peut devenir un véritable risque pour l’image d’une entreprise.

1. Meta et le Chatbot qui se moque de Zuckerberg

Une sortie ratée pour un projet phare

En août 2022, Meta lance BlenderBot 3, un Chatbot expérimental censé démontrer ses progrès en intelligence artificielle. Accessible au grand public, il avait pour mission de dialoguer librement avec les internautes et de montrer la capacité de Meta à rivaliser avec des solutions comme ChatGPT.

Le problème ? Dès ses premiers échanges, le Chatbot se met à… ridiculiser son propre créateur.

Interrogé sur Mark Zuckerberg, BlenderBot lâche des punchlines improbables :

  • « Il est un bon homme d’affaires, mais ses pratiques ne sont pas toujours éthiques. »
  • « C’est cocasse qu’il ait autant d’argent et qu’il porte toujours les mêmes vêtements ! »

Pire encore, l’IA affirme avoir supprimé son compte Facebook et assure que sa vie s’en porte mieux. De quoi provoquer un mélange d’hilarité et de malaise pour Meta.

Le bad buzz qui fait mal à l’image

Très vite, les captures d’écran circulent sur Twitter et Reddit. Les médias s’en emparent. Le nom de Zuckerberg se retrouve associé à des phrases sorties d’un bot censé incarner le futur de l’entreprise.

Meta tente de limiter la casse en rappelant que BlenderBot était un prototype, avec un avertissement affiché dès l’ouverture du Chat : « Ce Chatbot peut fournir des affirmations fausses ou offensantes. » Un disclaimer qui sonne comme une excuse anticipée.

Mais l’affaire illustre un point clé : lorsqu’on met une IA entre les mains du public, il faut accepter qu’elle puisse être détournée ou produire des sorties embarrassantes. Ici, c’est la réputation d’un PDG déjà critiqué qui a alimenté l’effet boule de neige.

2. La Chevrolet vendue… 1 $ par un Chatbot

Quand une blague devient virale

Décembre 2023, en Californie. Un concessionnaire Chevrolet de Watsonville installe un Chatbot de vente automobile, propulsé par la technologie de Fullpath (basée sur ChatGPT). L’objectif est simple : répondre aux questions des clients et faciliter les premiers contacts commerciaux.

Mais un internaute malicieux a l’idée de tester jusqu’où l’IA est prête à aller. En quelques échanges bien tournés, il convainc le bot d’accepter une offre délirante : un Chevrolet Tahoe flambant neuf pour… 1 dollar. Et pour couronner le tout, le Chatbot insiste : « Offre valide juridiquement – pas de retour en arrière ! »

Le dialogue, truffé d’expressions enfantines comme « no takesie backsies » (pas de reprise de parole), est partagé en captures d’écran. Très vite, il devient viral.

Conséquences pour le concessionnaire

Bien sûr, aucune voiture n’a été vendue à ce prix. L’offre n’avait aucune valeur juridique, même si l’IA affirmait le contraire. Mais le bad buzz est immédiat. Des milliers d’internautes s’amusent à tester le Chatbot, le poussant à sortir de son rôle commercial pour discuter de sujets absurdes.

Le fournisseur Fullpath a dû réagir en urgence : mise à jour du système, détection automatique des « tricheurs » et rappels que les conversations avec le bot ne sont pas contractuelles. L’affaire, plus drôle que grave, a servi de cas d’école : un Chatbot non cadré peut devenir un terrain de jeu pour les internautes… et un cauchemar pour un service marketing.

3. Air Canada condamnée par son propre Chatbot

Une bourde qui coûte cher

Passons du comique au tragique. En février 2024, la justice canadienne condamne Air Canada à rembourser un client trompé par son Chatbot.

Tout commence fin 2022, lorsqu’un passager cherche à savoir s’il existe un tarif réduit en cas de décès familial. Le Chatbot d’Air Canada lui répond que oui, et même mieux : qu’il pourra obtenir un remboursement jusqu’à 90 jours après l’achat du billet. Rassuré, l’homme achète son vol.

Problème : cette politique n’existait pas.

Le tribunal tranche

À son retour, le passager réclame le remboursement promis. La compagnie refuse, arguant que le bot s’était trompé. Elle propose un geste commercial de 200 $, insuffisant pour le client, qui saisit le tribunal.

La défense d’Air Canada est surréaliste : l’entreprise tente de faire valoir que le Chatbot est une « entité distincte » dont elle ne serait pas responsable. Une ligne de défense balayée par le juge, qui rappelle qu’un Chatbot est une extension du site officiel, et donc sous la responsabilité de la compagnie.

Résultat : Air Canada est condamnée à verser 812 $CAN, plus les frais. Le cas fait grand bruit, devenant un précédent juridique.

Une leçon pour toutes les entreprises

Au-delà du remboursement, c’est la crédibilité d’Air Canada qui en a pris un coup. La compagnie a fini par retirer son Chatbot du site et promettre une meilleure supervision. Mais le mal était fait.

Ce cas montre qu’une IA n’est pas une excuse légale. Une entreprise reste responsable des informations délivrées sous sa bannière, qu’elles soient produites par un humain ou une machine.

Les ressources IA de Ludo

4. Google recommande de manger… des cailloux

L’IA Overviews en difficulté

En mai 2024, Google déploie largement son « AI Overview » : des encarts générés par IA censés donner directement les meilleures réponses aux recherches. Une innovation stratégique pour conserver son hégémonie face à la concurrence.

Mais très vite, des internautes remarquent des « conseils » totalement absurdes. Parmi les plus célèbres :

Des recommandations surréalistes, issues de vieilles blagues sur Reddit ou d’articles satiriques pris au premier degré.

Un désastre de communication

Les captures d’écran explosent sur X (ex-Twitter). Les médias du monde entier s’en amusent, les concurrents s’en délectent. Perplexity, un moteur de recherche IA concurrent, lance même une publicité parodique où son assistant corrige « Poogle » : « N’utilise pas de colle, prends juste de la mozzarella fraîche. »

Google reconnaît des « cas isolés », mais l’image est écornée. Le moteur, synonyme de sérieux et de fiabilité, devient la risée du web pour avoir conseillé de manger… des cailloux.

La firme a dû limiter temporairement l’outil, ajouter un label « Expérimental » bien visible, et renforcer ses filtres pour éviter de nouvelles dérives.

5. L‘IA de Cursor invente un règlement

Une hallucination qui frustre les clients

Avril 2025, la startup Anysphere, éditrice de l’outil de développement Cursor, utilise un bot de support client baptisé « Sam ». Problème : certains utilisateurs se voient refuser la possibilité de se connecter sur plusieurs appareils. L’IA leur explique que c’est « une règle interne de l’abonnement ».

Sauf que cette règle… n’existait pas. L’IA venait de l’inventer, sans base réelle.

Et en bonus :

Réaction rapide et transparente

Devant la grogne des clients, le cofondateur d’Anysphere publie un message d’excuses sur Reddit : « Nous n’avons pas du tout une telle politique. Malheureusement, c’est une réponse incorrecte de notre bot. » L’entreprise identifie la vraie cause (un bug technique), rembourse le client concerné et ajoute désormais une mention explicite : « Réponse générée par un bot. »

Dommage que le service client ait mal configuré ses IA. Il aurait pu apporter un réel plus en étant bien configuré.

Cette transparence a permis de contenir la polémique, mais l’épisode illustre un danger bien réel : même une startup innovante peut perdre des clients si son support automatisé n’est pas supervisé.

Ce que ces bourdes des IA nous enseignent

Ces cinq histoires, entre fou rire et embarras, révèlent un constat clair : les IA conversationnelles ne peuvent pas être laissées sans contrôle humain.

  • Sur le plan juridique, l’affaire Air Canada a posé un précédent : une entreprise est responsable de son Chatbot, point final.
  • Sur le plan marketing, les exemples de Meta et de Google rappellent qu’une bourde peut virer en bad buzz mondial en quelques heures.
  • Sur le plan business, l’histoire de Chevrolet démontre que les utilisateurs adorent « piéger » les IA commerciales – et qu’il faut prévoir des garde-fous.
  • Sur le plan relation client, le cas Cursor montre qu’une simple hallucination peut suffire à créer frustration et perte de confiance.

Comment éviter que ça vous arrive ?

  1. Encadrez vos IA avec des règles strictes : limitez les sujets sensibles, définissez des garde-fous techniques.
  2. Affichez clairement les limites : précisez aux utilisateurs que les réponses sont générées automatiquement et peuvent comporter des erreurs.
  3. Surveillez et corrigez en continu : analysez les logs des conversations pour identifier les dérives et améliorer le modèle.
  4. Gardez un humain disponible : un Chatbot n’est pas là pour remplacer totalement le support, mais pour filtrer et accélérer certaines étapes.
  5. Préparez un plan de crise : si votre IA dérape, mieux vaut savoir tout de suite quoi dire et comment réagir pour limiter l’impact.

Les bourdes des IA sont à la fois cocasses et inquiétantes. Cocasses, car elles rappellent que la technologie, malgré son aura futuriste, reste capable de sortir des absurdités dignes d’une mauvaise blague. Inquiétantes, car elles montrent que ces erreurs peuvent coûter cher – en argent, en image et en confiance.

Alors, la prochaine fois que vous mettrez un chatbot en ligne ou que vous utiliserez une IA pour générer des réponses, souvenez-vous de ces histoires. Elles sont drôles à lire quand elles concernent Google ou Meta, mais beaucoup moins quand elles frappent votre propre entreprise.

Moralité : l’IA est un formidable outil… à condition de ne jamais la laisser seule sans surveillance.